Par ce travail, je n’éluciderai pas le mystère de notre épanouissement dans nos domaines artistiques ni celui de notre faculté de résilience. Je n’ai pas entrepris ce Projet pour répondre à des questions, mais plutôt pour en soulever… Je n’ai pas la prétention d’être psychologue, ni analyste, ni écrivaine. Cependant, je me suis rendu compte que beaucoup d’enfants adoptés ont développé un domaine artistique. Il me tenait donc à cœur de mettre en avant ces deux sujets que je connais si bien.
J’entends encore trop d’aberrations au sujet de l’abandon, les gens en parlent, mais ne savent pas… ils ne l’ont pas vécu de l’intérieur. Ce Projet est-il moralisateur ? Non ! Mais mon désir n’était pas d’en produire uniquement quelque chose de « joli à regarder ». Par nos témoignages, nous ne voulons pas lisser les problématiques liées à l’adoption. Nous ne cherchons pas non plus à désigner un coupable. Nous voulons faire entendre nos voix par rapport aux adoptions internationales. Un sujet qui, jusqu’ici, a été mal compris.
Ce Projet nous a également donné l’occasion de nous exprimer sur un sujet tabou, même entre personnes adoptées… Le fait d’écrire sur ce sujet, qu’il soit observable et extérieur à nous-mêmes, nous permet de mieux le comprendre également. Écrire nos histoires est plus pertinent que le fait d’en parler, car cela laissera une trace. Que nos souffrances soient enfin lues et reconnues nous aidera probablement à avancer.
J’espère que nos témoignages feront s’interroger la société et qu’ils bousculeront le point de vue sur les adoptions internationales, dont nous sommes la conséquence tourmentée. Le fait d’avoir posé des mots sur nos histoires ne nous fera pas oublier nos traumatismes, mais cela permettra de métamorphoser nos souffrances en un résultat encourageant et lumineux. Je veux aussi démontrer que l’adoption peut nous faire réfléchir jour et nuit parfois, mais que nous pouvons aussi en faire quelque chose de beau. Oui, c’était d’une brutalité extrême de nous avoir abandonné… mais cet acte nous a permis de devenir les personnes et les artistes que nous sommes.
Je désire que vous, les lecteurs, puissiez prendre la mesure de la complexité de l’adoption et ensuite y réfléchir par vous-mêmes. J’ai beaucoup hésité sur la pertinence de cet ouvrage et de son intérêt politique, culturel et artistique. Quoiqu’il en soit, c’était le moment de m’exprimer sur ce sujet. Je ne veux pas essayer d’y trouver la perfection en matière d’écriture ou de photographie, car la perfection est une chose relative, chacun en ayant sa propre définition. Ma vision de la perfection est simplement d’avoir créé cette œuvre avec mes tripes et d’oser vous l’exposer… avec mon cœur.